Le gouvernement chinois veut interdire les jeux de mot dans les médias et la pub
En Chine, l’agence qui contrôle les médias et la publicité a une nouvelle bête noire: les jeux de mots.
Selon les officiels du gouvernement, ces petites manipulations du sens sont une atteinte à la pureté de la langue et elles pourraient mener le pays au «chaos culturel et linguistique», rapporte The Guardian.
Les calembours risquent d’induire le public en erreur, particulièrement les enfants qui ne comprennent pas encore les subtilités du langage, avertit l’agence.
Les jeux de mots cités par les officiels sont pourtant complètement inoffensifs. L’agence prend notamment l’exemple d’une publicité touristique pour la région du Shanxi, qui joue d’une homonymie entre «perfection» et «Shanxi, terre de splendeurs.»
Officiellement, cette mesure fait suite à des plaintes envoyées à l’agence, mais comme l’explique un universitaire interviewé par le Guardian, il s’agit probablement d’une façon d’essayer de limiter la liberté d’expression des internautes qui utilisent des jeux de mots pour contourner les censeurs.
Afin de mieux comprendre la situation, il faut faire connaissance avec le cheval de l’herbe et de la boue, ou Ca Ni Ma, un alpaga dont le nom, s’il est mal prononcé, ressemble beaucoup à l’insulte «nique ta mère». Ce petit lama est devenu le symbole de la résistance à la censure.
Création d’un caractère (qui suppose en principe trois sinogrammes) pour le « cheval de boue et d’herbe » avec les caractères (simplifiés) pour « 草 cǎo » (pour « herbe »), « » 马 mǎ (pour « cheval »), et « 泥 ní » (pour « boue » et indiquant une prononciation).
En effet, en Chine, un blog peut être fermé s’il contient des obscénités, mais la stratégie des internautes est de dire: ce petit lama n’est pas obscène, allez-vous censurer toute mention de ce petit animal?
Ce genre de stratagème énerve le pouvoir. Déjà depuis 2012, le Twitter chinois, Sina Weibo, pénalise les utilisateurs qui mettent des homonymes dans leurs textes, explique le New York Times.
Pour parler de l’artiste dissident Ai Weiwei, certains bloggeurs utilisent un caractère dont le son est proche, et qui signifie «aime l’avenir». Ai Weiwei avait d’ailleurs posé nu avec un petit alpaga en guise de feuille de vigne.
Or «cheval de l’herbe et de la boue couvrant le milieu», le titre de la photo, ressemble beaucoup à une autre phrase: «nique le comité central du Parti communiste».
On comprend mieux pourquoi le gouvernement n’est pas fan des calembours.