Classe Moyenne : «un cercle dont le centre est partout et la circonférence nulle part». Pascal

Selon Jean-Marc Ayrault, à peine 6,6% des Français seraient touchés par les restrictions budgétaires….

Il est toujours piquant d’entendre un homme politique invoquer les «classes moyennes». On saisit alors qu’il ne sait pas vraiment de quoi il parle. Personne en France n’est en effet encore parvenu à appréhender ce que recouvre cette appellation.

L’Insee, par exemple, dont c’est l’une des missions que de photographier le niveau et le mode de vie des Français se refuse à utiliser ce terme flou et préfère parler de «catégories intermédiaires».

Mardi dernier, le jour même où Jean-Marc Ayrault prononçait son discours de politique générale, l’Insee nous apprenait donc dans son bilan annuel des revenus et des patrimoines – pur hasard du calendrier – que les catégories intermédiaires représentaient en France 70% de la population et que les plus pauvres en recouvraient 24,3%.

C’est pourquoi nous avons été soulagés quand le premier ministre nous a expliqué que «les classes populaires et les classes moyennes» seraient épargnées par les mesures de restrictions budgétaires, lesquelles consistent principalement en des hausses d’impôt. A contrario cela signifiait donc que seuls 6,6% des Français seraient touchés par ce que les ministres se refusent à qualifier de «rigueur».

Notons que les gens «aisés», terme officiellement utilisé tant par le gouvernement que par l’Insee, se décomposent quant à eux en deux groupes.

D’une part 5,3% de la population dont le revenu médian était de 48.610 par personnes en 2009 selon l’Insee (soit un peu plus de 4000 euros par mois). Et d’autre part 1,3% des Français, dont les ressources annuelles s’élèvent à 85.910 euros. Précisons que ces chiffres sont nets des impôts directs, dont l’impôt sur le revenu et la taxe d’habitation notamment. Autre précision, le revenu médian par lequel l’Insee définit les groupes en question est légèrement différent du revenu moyen ; il correspond en fait au chiffre qui sépare en deux parties égales – l’une au dessus et l’autre en dessous- les catégories respectives.

Les ministres sont-ils sincères quand ils affirment que les «classes moyennes» ne sont pas affectées par les mesures de restrictions?

Dans la classification de l’Insee cela désigne donc les 93,4% de Français dont les revenus annuels sont inférieurs à 31.670 euros.

Le recours systématique à la notion de «classe moyenne», à gauche comme à droite, exprime le malaise des politiques à regarder les réalités socio-économiques en face. Il faut reconnaître que le système français de services publics, relativement généreux, complique les choses. Les chiffres de revenus mentionnés précédemment constituent en effet des revenus en espèces, comprenant des prestations sociales en numéraire mais pas les services publics comme l’enseignement gratuit, entre autres.

Les politiques sont d’autant plus enclins à se prévaloir des «classes moyennes», qu’elles constituent une forte majorité de la population. Et surtout les Français sont tentés de s’y identifier pour une très grande part d’entre eux.

On pourrait adopter comme définition des classes moyennes ce que Pascal disait à propos de l’univers, «un cercle dont le centre est partout et la circonférence nulle part».

Comme pour la pauvreté, il n’existe pas de définition objective des classes moyennes. Libre à chacun de placer la barre où il l’entend. Jusqu’où aller ? Parler de « moyennes », pour des catégories situées parmi les 10 %, voire les 5 % les plus aisées, n’a pas grand sens. Quasiment toute la société devient moyenne, vidant de tout intérêt la hiérarchie sociale ainsi constituée.

Pour clarifier le débat, l’Observatoire des inégalités reprend le découpage suivant, identique à celui utilisé par le Crédoc ( cf le Graphique ci-dessus).

Les 30 % les plus démunis composent les catégories « modestes ».

Les 20 % les plus riches composent les catégories « aisées ».

Les classes « moyennes » se situent entre les 30 % les plus démunis et les 20 % les mieux rémunérés. Elles représentent 50 % de la population.

Perceptions subjectives

Il y a d’abord ceux qui « se sentent » classes moyennes. Depuis les années 1960, la part des individus qui s’identifient à la classe moyenne a doublé, relève l’Observatoire des inégalités. Aujourd’hui, 50 à 75% des Français s’identifient aux classes moyennes.
Il y a certains des individus parmi les moins favorisés qui préfèrent l’image valorisante des classes moyennes, et à l’inverse, les plus favorisés, peu conscients de leur aisance, qui se considèrent majoritairement comme faisant partie des classes moyennes.

Critères objectifs

La catégorie socioprofessionnelle du chef de famille peut constituer un premier critère sociologique objectif. Les classes moyennes regrouperont alors les « professions intermédiaires », les « employés » et une partie des « cadres supérieurs », selon le classement Insee.
Vient, concomitamment, le critère des revenus. Les classes moyennes sont celles qui se situent au plus près du revenu médian. On écarte les 30% les plus démunis composant les catégories « modestes », et les 20% les plus riches constituant les catégories « aisées » (classement Credoc). Au milieu, les 50% de la population représentant les classes moyennes.

En termes de chiffres, si l’on considère les revenus nets mensuels après impôts et prestations sociales, cela donne 1.163 à 2.127 euros pour une personne seule, 2.174 à 4.068 euros pour un couple sans enfant, et 3.057 à 5.174 euros pour un couple avec deux enfants (source : Observatoire des inégalités, 2008).

On attend en tout cas le sondage qui nous dira que 93,4% des Français estiment qu’ils ne seront pas touchés par les mesures toutes estampillées sous le sceau de la «justice fiscale» que Jean-Marc Ayrault leur a annoncée. Matignon devrait s’y risquer.

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4 Responses to Classe Moyenne : «un cercle dont le centre est partout et la circonférence nulle part». Pascal

  1. Avatar de Bernard DUBOIS Bernard DUBOIS dit :

    Pourquoi tout ce « bla-bla » ? Les choses sont plus simples , la société se divise en deux groupes : les possèdants et les ………. autres ; les exploitants et les exploités . Quoi de plus normal que de faire « payer » ceux qui ont des revenus supérieurs à un niveau moyen qu’il est possible de calculer en fonction des salaires de l’ensemble des français .
    Quand à ceux dont les revenus ne proviennent pas de leur force de travail (actions en bourse,présence dans les conseils d’administration ,patrons du CAC 40 , etc …) , il convient de les « taxer » un maximum .
    Au dessus d’un seuil de revenus , les sommes dont disposent certains ménages, sont indécentes et ce sont ceux là qui doivent être imposés le plus .
    C’est celà la JUSTICE SOCIALE .

    • Avatar de Le Haut Parleur Le Haut dit :

      Monsieur,
      Cet article a pour mérite d’expliquer le concept de « classe moyenne« , et de faire prendre conscience qu’à partir d’un revenu de 4000 Euros, un couple peut être considéré comme inscrit dans la « classe aisée », donc directement soumis aux ponctions fiscales, directes et indirectes, instaurées par le gouvernement de JM Eyrault. C’est aussi d’éveiller la vigilance de chacun/ chacune sur les modifications actuelles et à venir de la fiscalité des revenus du travail, des successions, de l’épargne … thèmes sur lesquels nous reviendrons.
      Nous ne reprendrons pas les thèmes chers à nos anciens et relatifs à la lutte des classes, qui ne sont plus d’actualités, et heureusement, de ce jour.
      La rédaction

      • Avatar de Bernard DUBOIS Bernard DUBOIS dit :

        Libre à vous de ne pas croire à la lutte des classes , mais alors laissez, sur votre blog , s’exprimer ceux qui pensent qu’elle n’a jamais été autant d’actualité .
        Les successions d’entreprises doivent être taxées de manière plus forte ; il est anormale que des enfants qui naissent avec une cuillère d’argent dans la bouche succèdent à la tête de l’entreprise de « papa » même si et surtout leurs capacités résultant de leurs résultats scolaires sont largement au-dessous de la moyenne . Pour les successions des biens , de quel droit les enfants doivent être exonérés en bénéficiant du « travail » de leurs géniteurs pour lequel ils n’ont en rien contribué ?
        Pour les revenus du travail , une grande réforme de la fiscalité doit être réalisée par une « ponction » à la source et la création de tranches supplémentaires d’impôts. Un couple avec 4000 euros de revenus ,cela ne veut rien dire .Avec un seul enfant ce couple doit payer plus qu’un couple avec six enfants ……….. et moins qu’un couple sans enfant .
        L’épargne doit elle aussi être « taxée » afin que l’argent puisse être ré-injecter dans la consommation ; d’où la nécessité d’augmenter de manière conséquente les salaires et les retraites , de geler les prix des loyers , du gaz ,de l’électricité , des produits de première nécessité ,de l’essence , du fuel , BAISSER LE TAUX DE LA TVA (impôt le plus injuste qui soit car il est payé de la même manière quelque soit ses revenus ) – sauf dans la restauration où il faut la rétablir et pour d’autres produits de luxe – ,etc ….
        Ce gouvernement « socialiste » ne va pas assez loin dans tous les domaines , comme toujours .
        A quand les nationalisations ? A quand les interdictions des licenciements boursiers ? A quand le pouvoir réel à ceux qui produisent les richesses du pays en vendant leur force de travail ?
        A CHACUN SELON SES BESOINS …………..

      • Avatar de Le Haut Parleur Le Haut dit :

        L’équipe du Haut Parleur et sa rédaction vous ont donné la libre expression, et ce suivant la charte de déontologie, que nous avons inscrite en préambule à ce site.

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